La « fusion transformationnelle et complémentaire » avec Net-A-Porter permettra de couvrir tous les marchés géographiques du luxe et tous les segments de clientèle », indique Yoox qui évoque une base de données cumulée de 2 millions de clients à fort pouvoir d’achat et une audience globale de 24 millions de visiteurs uniques par mois. (Photo © Fred McGregor / Yoox)

Yoox Net-A-Porter : naissance d’un leader mondial du luxe digital

dans Economie , à 22 août 2019

Les rumeurs qui couraient depuis quelques jours ont sans doute accéléré la diffusion de l’information confirmée ce matin, veille du 1er avril : Yooxet Net-A-Porter vont fusionner pour donner naissance au leader indépendant de la vente en ligne de produits de mode et de luxe. Les deux portails internet sont respectivement basés à Milan et à Londres.

Baptisé Yoox Net-A-Porter, le nouveau groupe représente un chiffre d’affaires combiné de 1,3 milliard d’euros. Il sera coté à Milan sous le code boursier YNAP. Les sites internet ne fusionneront pas mais des économies d’échelle sont attendues à hauteur de 60 millions d’euros. Les effectifs communs dépassent aujourd’hui les 3.300 collaborateurs.

D’après le document financier du projet, les revenus pour l’exercice 2014 de The Net-A-Porter Group ont progressé de +25,7 % à 753,8 millions d’euros pour une prise moyenne de commande d’un montant de 481 euros (202 euros pour Yoox). Le bénéfice brut était en hausse de +28 % à 307 millions d’euros.

Fondé en 2000 par Federico Marchetti, le groupe Yoox a développé des sites e-commerce d’une trentaine de marques de mode et de décoration telles que Armani, Valentino, Moncler ou Kartell et, dans le cadre d’un joint-venture formalisé en 2012, les plates-formes de marques appartenant à la division luxe du groupe français Kering (Sergio Rossi, Bottega Veneta, Stella McCartney, Alexander McQueen, Balenciaga, Ysl et Brioni).

« Cette fusion est une nouvelle donne pour nos deux sociétés pionnières qui ont déjà transformé radicalement le marché depuis l’an 2000. Nous allons maintenant renforcer les liens avec les marques leaders du luxe afin d’exploiter le formidable potentiel de croissance encore inexploité » a commenté Federico Marchetti. Le futur directeur général restera actionnaire à hauteur de 5,5 %.

Lancé également en 2000 par Nathalie Massenet, le groupe Net-A-Porter est présent dans les secteurs de la mode et de la beauté sous sa marque principale et deux autres noms, Mr Porter et The Outnet, sur internet et à travers des produits éditoriaux déclinés en magazines imprimés ou en ligne. L’ancienne journaliste sera nommée présidente exécutive de la nouvelle entité.

Net-A-Porter appartient depuis 2010 au numéro deux mondial du luxe, la Compagnie financière Richemont, qui contrôle une vingtaine de maisons prestigieuses telles que Cartier, Chloé, IWC Schaffhausen, Jaeger-LeCoultre, Lancel, Montblanc, Officine Panerai, Piaget, Roger Dubuis, Vacheron Constantin ou encore Van Cleef & Arpels.

Son président, Johann Rupert, suggère que cette opération contribuera à « protéger le caractère unique de l’industrie du luxe ». Il souligne que « les modèles économiques traditionnels sont de plus en plus perturbés par les géants technologiques ».

L’accord conditionnel sera soumis aux actionnaires de Yoox au mois de juin. L’opération doit être finalisée au mois de septembre. Une augmentation de capital de 200 millions d’euros est ensuite prévue dans le but de financer de nouvelles opportunités de croissance. La possibilité de faire entrer d’autres d’investisseurs stratégiques est évoquée.

Environ 35 % des marques de luxe sont encore absentes de la vente sur internet, indique la dernière étude sectorielle signée Bain & Company. Selon les observations de ce cabinet de consulting, les ventes en ligne de produits de luxe enregistrent une croissance exponentielle à deux chiffres depuis le début des années 2000. En 2014, elles ont encore augmenté de +24 % pour atteindre les 12,2 milliards d’euros, soit 5 % du montant total du chiffre d’affaires généré par le secteur des biens personnels de luxe dans le monde. Dix ans plus tôt, le chiffre d’affaires était de 1,3 milliard d’euros.

Le shopping digital de luxe est le plus développé dans les Amériques mais Yoox a déjà rapporté l’intérêt grandissant de la clientèle asiatique. Le 28 novembre 2014, jour du Black Friday, le groupe internet a reçu la visite de 1,5 million de clients en provenance, par ordre décroissant, de New York, Moscou, Tokyo, Londres, Los Angeles, San Francisco, Pékin, Milan, Rome et Paris.

Un géant technologique chinois, le groupe Alibaba, ne cache pas depuis le mois de mai dernier son intérêt pour les produits européens, notamment français. Un protocole d’entente a même été signé dans le cadre des célébrations du 50e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et la Chine. Objectif : faciliter auprès des millions de consommateurs chinois, clients de ses plates-formes internet, la promotion et la vente, si possible, de « fleurons de l’art de vivre à la française ». Un futur partenaire ou concurrent ?